Préservation de la fertilité masculine

La spermatogenèse est le processus continu qui permet, en 74 jours environ, aux spermatogonies, cellules souches diploïdes (2n chromosomes), d’aboutir aux spermatozoïdes, gamètes mâles haploïdes (n chromosomes). Ce phénomène débute à la puberté et se poursuit jusqu’à un âge avancé.

La toxicité des traitements peut entraîner :

  • Une infertilité par effet létal des cellules souches germinales
  • Des mutations de l’ADN au niveau des cellules souches et être responsable de fausses couches chez la partenaire, malformations ou anomalies génétiques dans la descendance
  • De façon plus rare, une atteinte des cellules de Leydig responsable de la sécrétion hormonale de testostérone

Des données statistiques sont disponibles sur les chances de récupération de la spermatogénèse mais il est toujours difficile de prédire de façon certaine la fertilité post traitement car elle dépend de :

  • l’âge au moment du traitement,
  • spermogramme avant le début du traitement
  • la région traitée
  • type de traitement (doses, molécules, fractionnements,..)
  • la période écoulée depuis la fin du traitement
  • de la sensibilité individuelle

Une autoconservation de sperme doit être proposé avant tout traitement gonadotoxique et/ou mutagène. Après le début des traitements, la congélation de spermatozoïdes n’est plus possible car les mutations induites ne peuvent pas être réparées. De plus, il est indispensable que le couple utilise une contraception pendant le traitement et après celui-ci.

La reprise de la spermatogénèse peut survenir plusieurs années après l’arrêt du traitement

Les spermatogonies sont sensibles aux agents mutagènes mais, à la différence des cellules matures comme un spermatozoïde, ont la capacité de réparer les mutations lors des divisions

Il est recommandé d’attendre un minimum d’un à deux ans avant de concevoir naturellement pour permettre la réparation de mutations induites.

 

Les traitements gonadotoxiques

Chimiothérapie

L’impact de la chimiothérapie sur la spermatogénèse est dose-dépendant et variable d’un individu à l’autre. Il existe une grande diversité de traitements antimitotiques, souvent en association et en évolution constante. Il est toujours difficile d’évaluer les conséquences de chacun de ces traitements sur le risque d’infertilité. Cependant, certaines molécules sont bien connues pour leur toxicité comme les agents alkylants (cyclophosphamide, chlorambucil, busulfan, procarbazine, sels de platine à forte dose…) dont les effets gonadotoxiques sont les plus sévères.

La chimiothérapie atteint surtout la fonction exocrine par lésions des cellules germinales. La fonction endocrine est souvent préservée et la testostéronémie reste normale. Cependant d’éventuels troubles sexologiques peuvent apparaître à la suite de chimiothérapies antimitotiques.

 

Radiothérapie

La gonadotoxicité est liée soit à :

  • L’irradiation directe de la région pelvienne à proximité des testicules : Plus la cible est proche et plus le risque de non récupération de la spermatogénèse permanente est élevée. De plus, à dose égale, plus le fractionnement est important plus la toxicité est forte. En revanche, la fonction endocrine du testicule est plus longtemps préservée lié à une plus grande résistance des cellules de Leydig.

 

  • L’irradiation corporelle totale : elle est associée à des associations de chimiothérapies très gonadotoxique. Les effets de l’un ou l’autre des traitements sont alors difficiles à évaluer et le seuil d’irradiation (dose, débit, fractionnement… etc) à partir duquel une azoospermie définitive est attendue est difficile à déterminer.

 

  • L’irradiation hypophysaire, ou crânio-encéphalique > 24 Gy, peut également entraîner un retentissement sur le bon fonctionnement de l’axe gonadotrope et la stimulation de la production de spermatozoïdes. Un traitement hormonal substitutif peut être mis en place

 

Chirurgie

La chirurgie testiculaire, du col vésical, la vessie ou la prostate, les curages ganglionnaires rétropéritonéaux, voire le rectum, peuvent avoir une incidence sur l’innervation de la fonction érectile et avoir un impact négatif sur la sexualité et sur la fertilité.

 

Les techniques de préservation de la fertilité

1. L’autoconservation de spermatozoïdes

C’est la technique de référence chez l’homme dès la puberté.

Il s’agit d’un prélèvement de sperme réalisé par automasturbation au laboratoire du CECOS, après consultation médicale et avant le début des traitements gonadotoxiques.

Ces prélèvements peuvent être réalisés en urgence et être répétés sur plusieurs recueils (idéalement 2 à 3). Aucun délai d’abstinence n’est nécessaire. Le sperme est analysé et les spermatozoïdes obtenus sont conditionnés et congelés dans des paillettes puis stockées dans des cuves d’azotes liquides à -196°C. La conservation peut durer de nombreuses années sans altération de leur pouvoir fécondant. Des publications font état de grossesses obtenues avec du sperme ayant été congelé il y a plus de 30 ans sans augmentation du nombre d’anomalies chromosomiques ni de malformation à la naissance.

 Parfois, en fonction du type de pathologie et / ou de l’état clinique du patient, le recueil est impossible ou un échec. Il est alors possible d’avoir recours :

  • Vibromasseur ou des injections intra caverneuse de prostaglandines pour induire une érection
  • Electrostimulation sous anesthésie générale
  • Prélèvement chirurgical testiculaire ou épididymaire au bloc opératoire.

La réutilisation ultérieure peut se faire dans le cadre d’une assistance médicale à la procréation (AMP) pour un patient :

  • En couple hétérosexuel
  • De moins de 60 ans
  • Après réévaluation de la spermatogénèse par un spermogramme
  • En rémission et en concertation avec l’oncologue
  • Pris en charge à 100% par la Sécurité Sociale

En moyenne, on estime autour de 10% les patients qui réutiliseront leurs paillettes après un traitement anticancéreux (données ABM).

 

Dans le cadre de l’AMP, 2 techniques sont possibles. Le choix de la technique se fait en fonction du bilan des 2 membres du couple et de la qualité des paillettes :

  • L’insémination intra-utérine : plusieurs paillettes de sperme de bonne qualité sont nécessaires. Pour qu’une insémination intra-utérine ait de bonnes chances de grossesse, il est conseillé de recueillir au moins 1 million de spermatozoïdes mobiles après préparation.
  • La fécondation in vitro avec ou sans micro-injection

 

2. Alternatives

Pour des raisons médicales ou bien parce que le patient n’a pas souhaité réaliser de préservation de la fertilité, le recueil de gamètes n’est pas toujours possible. Le patient pourra être revu à distance de la fin des traitements gonadotoxiques. Une nouvelle évaluation de sa spermatogénèse pourra être réalisée à distance (minimum un an) et le patient pourra être conseillé sur son futur projet de parentalité.

 

Le projet de parentalité peut également passer par :

  • Le don de sperme : en fonction des caractéristiques médicales de la conjointe, les paillettes de sperme seront utilisées par une technique insémination intra utérine ou de Fécondation in vitro. Cette technique est réalisée au sein de centres d’Assistance Médicale à la procréation agréés et est prise en charge à 100 % par l’Assurance Maladie.

Agence de Biomédecine : don d’ovocytes